" Ce conflit qui déchira les
frontières et anéantit les espaces écartela les familles dont beaucoup de
membres se perdirent à jamais.
Sortons de ce préambule rétrospectif pour évoquer des
souvenirs qui, même porteurs de désarroi et entachés d'une certaine tristesse
nous ont fait vivre des moments inoubliables gravés dans nos mémoires quand il
y eut les séparations et l'éclatement du noyau familial.
Natifs de Bègles, banlieue
bordelaise, issus d'une famille de 5 enfants souffrant de privations dues au
contexte général engendré par la guerre nous voici séparés de nos parents et de
nos deux petites sœurs.
Cette mesure qui se voulait
humanitaire et salvatrice, mise en place par les services sociaux de la mairie
nous a donné le statut de réfugiés sanitaires.
Une bonne décision sans doute
mais pour nous enfants de 9, 7 et 6 ans, elle fût un déchirement, bien que ce
fût nécessaire. Quand nous reverrons-nous ?
Cela a été également douloureux à
vivre pour mes parents. Nous allons être à l'écart des risques du conflit, eux
continueront à les endurer. Les bombes destinées à la destruction de la base
sous-marine et de l'aéroport de Mérignac et au-delà de l'agglomération de
bordeaux et des installations portuaires stratégiques sifflaient régulièrement
sur nos têtes. Les troupes allemandes passaient au bout de notre jardin situé
entre deux de leurs bases. Les risques étaient grands, permanents, les
déplacements privés périlleux.
C'est donc à l'été 1942 que
commence notre déplacement vers ce Lot et Garonne, terre d'accueil.
Nous étions nombreux à être
concernés par cet exode et après être arrivés à Monflanquin où sans
l'insistance de mes sœurs, j'aurai pu être séparé d'elles, nous sommes pris en
charge par le maire de la commune où nous séjournerons."
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Roger Lantié 9 ans placé dans la Famille Tornier,
Granger (Pastor actuel)
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Josette Lantié, 7 ans placée dans la famille Garrigou,
Bécade (Barre actuel)
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Jeanine Lantié, 6 ans placée dans la famille Eyma à
Luguet (Miroux actuel)
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Suzette Desvignes, placée dans la famille Gauffre, Bourg
(gîte actuel)
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Denise Desvignes, placée dans la famille Labay, Bourg
(Franzin actuel)
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"Petit Louis" Desvignes placé dans la famille
Gros, Lauzel (Carter actuel)
Tous ces enfants étaient dans des familles qui n'en avaient
pas. La prise en charge des enfants était bénévole. Tous ont été scolarisés à
Savignac. Ils ont vécu à Savignac de 1942 à 1945, sauf Josette qui repartira en
1947.