dimanche 24 mars 2013

Les souvenirs de Josette Lantié 1/3

"Mes souvenirs personnels de ce voyage différent peut être de ceux de Jeanine et Roger.

Le départ de Bégles à  été une fête pour moi car j'allais prendre le train pour la première fois de ma courte vie. À 7 ans à cette époque et surtout dans un contexte de guerre on ne sortait pas de son quartier. Sur le chemin de la gare je me souviens de m'être retournée et à ma grande surprise j'ai vue ma mère pleurer mon père la tenant par les épaules et la consolant ce qui n'était pas le genre de la maison.

J'ai ensuite un grand vide  ( est-ce l'âge actuel ou la fatigue d'alors) je ne refais surface que lorsque nous nous sommes arrêtés à Monflanquin. Nous étions entre 10 et 15 enfants sur le plateau d'une camionnette . De temps en temps la camionnette s'arrêtait et 2.ou 3 enfants en descendaient me laissant indifférente jusqu'à ce que Roger soit saisi et se mette à hurler. Jeanine et moi avons hurlé aussi en disant que c'était notre frère . Grand conciliabule des  "autorités" locales qui dans leur grande bonté décidèrent  que le maire de Savignac ,qui était la dernière commune desservie se débrouillerait avec le supplémentaire .Pour Savignac restaient donc les trois Devignes les trois  Lantié ....et je ne me souviens plus de la surnuméraire !!!(Laurence Desvignes)
À cette époque il y avait de la vie dans le bourg. Autant que je me souvienne ,mais c'est peut être amplifié par mon ressenti de petite fille, il y avait du monde quand la camionnette s'est arrêtée devant chez Campagnac dans le bourg. Une dame m'a prise par la main, une autre à pris la main de Roger et une autre encore à pris Jeanine. Puis nous sommes tous descendus jusqu'à la boulangerie Eyma ou régnait une merveilleuse odeur de pain frais et ou je voyais pour la première fois des pains aussi gros ( des pains de 5 et des pains de 10????!) j'ai pendant assez longtemps eu du mal à comprendre ces appellations.

Ensuite chacun est parti de son côté .Roger chez Tornier, Jeanine chez Eyma et moi  chez Eléonore .
 Et là commence ma vie : jusqu'à ce jour là nous vivotions avec toutes les restrictions que l'on rencontre en temps de guerre, même si un gosse ne réalise pas vraiment il ressent. Je suis arrivée dans une maison de femmes. Il y avait, la Mémée, Sylvanie, Eléonore, la bonne qui s'appelait Esther et Moi. Car à partir de ce jour-là j'ai été la reine. Le jour de mon arrivée je ne comprenais pas ce que ces femmes pouvaient bien dire, elles parlaient patois. En ce temps là on ne connaissait pas la langue d'Oc mais le patois oui. Ma plus grande surprise à été de voir des dames habillées de noir avec des robes jusque en bas des pieds, des cheveux peignés en chignons. Une maison immense dont la cuisine était presque aussi grande que notre maison à Bégles. La grandeur de la cheminée me faisait un peu peur. Le plus impressionnant était cette énorme table éclairée par une lampe à pétrole suspendue au dessus. Pendant la préparation du repas qui se faisait au coin du feu (à petit feu ) tout au long de la journée, la Mémée se tenait près de l'âtre et entretenait le feu pour que ça mijote. Le soir on allumait la lampe juste le temps du repas et ensuite toutes nous nous groupions dans la cheminée et la les histoires commençaient. Heureusement que je ne comprenais pas du moins les premiers temps car c'était des légendes qui avaient l'air vraies. Au bout de très peu de temps je comprenais très bien le patois même si je ne le parlais pas car à l'école  c'était interdit. Ah !l'école!!!!!  et les demoiselles Goulfié.

Je revois encore l'une de ces Demoiselles arrivant dans la classe horrifiée  parce que j'avais des poux. Personne ne s'était aperçu de rien. On m'a renvoyée à Bécade avec ordre de ne revenir que lorsque je serais débarrassée de ces habitants. Perplexité à Bécade où on n'avait pas ce genre de problème habituellement À la guerre comme à la guerre,j'ai eu la tête imbibée de pétrole pendant un jour et une nuit. Je peux vous affirmer que c'est radical. Je n'ai plus jamais eu de poux et j'ai failli ne plus avoir de cheveux non plus.